Deux fois par an le passage des Grues cendrées permet aux Lotois d’assister au merveilleux spectacle de la migration.
Quittant leur territoire de nidification dans le nord-est de l’Europe, cet oiseau imposant survole la France dans sa diagonale nord-est sud-ouest pour rejoindre ses quartiers d’hivernage (Champagne, Landes, péninsule ibérique et Afrique du nord). Le pic de ce passage a lieu au-dessus de notre région sur les deux premières décades de novembre, mais les oiseaux sont parfois visibles dès début octobre et jusqu’à fin décembre. Le voyage retour, selon le même axe, s’étale dans le sud-ouest de la France entre la mi-janvier et la mi-mars, avec un pic sur la dernière décade de février et la première semaine de mars. Environ 360 000 Grues cendrées transitent par l’Hexagone chaque année, et 100 000 à 120 000 y séjournent pour la période hivernale.
Parfois confondues à tort avec des oies sauvages, les Grues cendrées sont souvent repérées à leurs cris sociaux « grou grou », qui leur ont valu leur nom. On peut alors lever la tête et observer leur vol en formation (en V ou en ligne), efficace pour économiser leur énergie durant ce long et périlleux voyage. La silhouette de l’oiseau peut alors être appréciée : cou tendu et pattes dépassant largement de la queue (cf. illustrations ci-dessous). L’oiseau est en effet un grand échassier de 2 à 2,40 m d’envergure, d’1,10 à 1,30 m debout, pour seulement 4 à 6 kg. En moyenne, les grues parcourent 40 à 50 kilomètres par heure lors de leur migration.
Les groupes de migrateurs peuvent atteindre plusieurs centaines d’individus, et ont lieu de jour comme de nuit. Certains sites de haltes migratoires peuvent simultanément accueillir plus de 200 000 Grues cendrées (lac du Der-Chantecoq entre la Marne et la Haute-Marne). Cette année, le 20 octobre, ce sont au-moins 91 000 de ces oiseaux qui ont été dénombrés aux dortoirs (lieux de rassemblement nocturnes des espèces grégaires) avant un grand départ le jour suivant. La LPO Champagne-Ardenne permet d’ailleurs de suivre la migration des grues au jour le jour : https://champagne-ardenne.lpo.fr/grue-cendree/migration-et-hivernage/la-migration-des-grues-cendrees-au-jour-le-jour
Migration de Grues cendrées - Photo d'Alain Fouclet
L’espèce est protégée en France depuis 1967. Les dangers qui pèsent sur les oiseaux migrateurs durant ce voyage restent néanmoins nombreux. En premier lieu, les phénomènes climatiques extrêmes peuvent être fatidiques (désorientation, épuisement), et sont de plus en plus récurrents avec les changements climatiques. Des obstacles humains sont aussi à surmonter : la pollution lumineuse des villes perturbe l’orientation des animaux volant de nuit, les lignes électriques et les éoliennes sont sources d’électrocution et de collision, l’urbanisation empiète sur les zones de repos indispensables pour récupérer des forces au cours de ce périple épuisant.
En France, on ne trouve qu’une vingtaine de couples reproducteurs en Lorraine. Le reste des oiseaux survolant la France niche dans les marais et forêts marécageuses de Suède, Finlande, Allemagne et Pologne. Les couples sont territoriaux et dispersés. Leur nid est à même le sol, souvent entouré d’eau. Un à deux œufs y sont pondus, et la famille reste unie jusqu’en hiver. La Grue cendrée se nourrit surtout d’invertébrés à la belle saison, davantage de végétaux le reste de l’année.
A l’automne 2023, plus de 7 000 Grues cendrées ont été comptées au-dessus du Lot, sur 34 communes différentes. L’hiver dernier, ce sont plus de 9 000 de ces oiseaux qui ont été comptabilisés sur 42 municipalités. Partagez vous aussi vos observations sur faune-occitanie.org ou sur l’application NaturaList pour recenser les grues. Ce site et cette application permettent de référencer et de géolocaliser toute espèce d’oiseaux, d’insectes, de mammifères, d’amphibiens ou de reptiles de la région. Chaque partage d’observation permet de contribuer à une meilleure connaissance de la biologie des espèces (notamment des périodes de passage pour les migrateurs) mais aussi de l’état des populations selon les secteurs.
Vol de Grues cendrées - Photo de Philippe Tyssandier